ÉPISODE 18 : MAEATA RÊVE À HUGO...
Vendredi 24 août 2018 :
ÉPISODE
18 : Maeata rêve à Hugo…
Cela faisait une semaine que Maeata avait de nouveau
rencontré le bel inconnu. Ils avaient passé un moment délicieux dans une
guinguette en bord de Seine. Il s’appelait Hugo Demours. Il était
techno-chercheur et travaillait sur l’équipement des humains qui partaient
vivre sur d’autres planètes. Les progrès dans ce secteur avaient fait des pas
de géant. `
Il avait expliqué à Maeata que les terriens partis
vivre sur Mars dont on recevait des nouvelles régulièrement, via Mars-Écoute,
le centre spécialisé sur le suivi des humains installés sur Mars depuis 2025
avaient connu d’énormes difficultés pour s’adapter, et que des années avaient
été nécessaires pour créer une atmosphère respirable et pour vivre en autarcie
alimentaire. Maintenant, la vie
avait pris un tour plus positif, presque similaire à la vie sur terre. Des
enfants avaient vu le jour, des petits Martiens, et parmi les primo-arrivants,
certains étaient morts et enterrés. Aucun des primo-arrivants ne regrettait son
choix.
Maeata avait été captivée par les propos tenus par
Hugo. Elle avait hâte de le revoir mais ils n’avaient rien fixé, ils s’étaient
juste promis de se revoir. Elle s’était surprise à rêver d’Hugo. Pourtant, tout
se passait bien avec son compagnon, Halidor. Oui, mais il lui manquait cet aspect
imprévisible, ce mystère, que certains
humains possèdent. D’Halidor, elle savait tout. C’était elle qui avait donné
les caractéristiques qu’il devait posséder pour devenir son compagnon dans la
vie. Il était charmant, prévenant, doux et parfois même sensible, enfin, à sa
façon.
Un souvenir la fit frissonner : Hugo
lui avait saisi la main, sa peau était si douce et si chaude… Halidor n’avait
pas la peau aussi agréable, on aurait dit que la peau d’Hugo était à l’exacte
température de celle de Maeata. C’était délicieux. Il n’avait pas cherché à
aller plus loin mais il avait plongé son regard dans ses yeux, elle en avait
fait autant et elle avait découvert des paillettes dorées dans ses iris. Il lui
avait dit, d’un ton admiratif avec les inflexions de sa voix grave :
– Je n’ai jamais vu une femme qui possède ta couleur
d’yeux, ils me font penser au lagon de Bora-Bora. D’où te vient-elle ?
Elle avait répondu qu’elle lui venait de sa mère. Il
avait poursuivi :
– Et ce contraste avec ta couleur de peau, quel
superbe contraste ! Quand tu étais petite, as-tu demandé à tes parents de
te faire fabriquer une poupée à ton effigie ?
– Oui, bien sûr, c’était la grande mode, toutes les
filles et tous les garçons avaient une poupée qui leur ressemblait trait pour
trait. Tu te souviens, les psychanalystes avaient décidé que cette mode était
excellente pour développer la confiance en eux des enfants. On les apportait à
l’école et c’étaient nos effigies qui étaient punis, sanctionnés à notre place.
Par contre, dès qu’on faisait quelque chose de bien, c’était nous qui recevions
les compliments et les récompenses. Nos poupées étaient maltraitées mais elles
n’étaient pas vivantes. Je n’ai pas pu garder la mienne, un de mes camarades de
classe lui avaient ouvert le ventre et arraché les yeux avec un couteau. Ma
poupée avait été mise en prison et chaque jour, nous la découvrions enfermée
dans sa cage vitrée, derrière des barreaux, dans l’entrée de l’école.
L’institutrice avait affiché les raisons pour lesquelles elle allait y passer
le reste de son existence, c’est à dire aussi longtemps que le garçon meurtrier
de ma poupée vivrait.
À son
tour, elle lui avait posé la même question, en lui demandant si le fabricant de
sa poupée avait réussi à rendre les merveilleuses paillettes dorées qu’il
possédait. Il avait secoué négativement la tête :
– Non, je n’ai jamais eu de poupée à mon effigie.
Mes parents y étaient opposés, ils estimaient que si j’étais l’auteur d’une
faute, je devais payer, ils refusaient que ma poupée soit punie à ma place. Ils
prétendaient que ce n’était pas éducatif de faire porter par un autre, fut-ce
une poupée, une faute dont l’humain était coupable. Qu’en penses-tu ?
– En ce
qui me concerne, cela me faisait souffrir, l’idée de voir ma poupée souffrir à
cause de moi, donc je m’efforçais de ne pas provoquer de sanction. J’étais sage
dans le but de la protéger, mais toi, comment t’en sortais-tu ?
– Quand je voyais le traitement infligé aux poupées,
en punition des fautes commises par les enfants responsables, je tremblais à
l’idée de recevoir des coups, d’être brûlé, ou d’avoir mes cheveux arrachés.
Ils en étaient restés là de leur discussion car
soudain, Hugo s’était levé et avait dit :
– Je n’ai pas vu le temps passer, désolé, je dois
rentrer. À bientôt, Maeata !
Il avait filé avant qu’elle n’ait pu réagir et elle
avait senti un vide dans son corps, au niveau de son ventre, un vide qu’elle
n’avait jamais ressenti. La tristesse l’avait envahie et quand elle était
arrivée chez elle, Halidor l’avait prise dans ses bras et lui avait dit :
– Tu as l’air fatiguée, ta journée était difficile
au bureau ? Je t’ai préparé un cocktail dont tu me diras des nouvelles !
Assieds-toi, je te l’apporte.
Elle avait obéi et goûté, puis elle s’était
exclamée :
– Oh c’est délicieux, bravo, où t’es-tu procuré la
recette ?
– Sur internet bien sûr, j’ai un site que
j’affectionne.
Ils avaient dîné tranquillement, ensuite, Halidor
avait voulu la caresser mais elle l’avait repoussé en lui expliquant qu’elle
n’en avait pas envie, qu’elle se sentait trop fatiguée ; il s’était
rembruni, c’était la première fois que Maeata refusait, il avait insisté mais
elle n’avait pas changé d’avis. Elle préférait rêver d’Hugo.
La nuit qui avait suivi, elle avait peu dormi et
s’était levée très tôt. Halidor ne s’était pas réveillé, il dormait toujours le
même nombre d’heures quelle que soit l’heure à laquelle il s’était couché, la
programmation de son sommeil était immuable.
Ce matin, avant de partir à son bureau, elle avait
décidé de prendre des nouvelles de l’animateur, Dimitri Tordahl, qu’Halidor
avait malencontreusement envoyé à l’hôpital. Elle eut un peu de mal à obtenir
la communication avec le médecin qui le soignait mais quand il y parvint,
celui-ci lui annonça une excellente nouvelle :
– Monsieur Tordahl est sur le point de nous quitter,
nous le considérons comme sorti d’affaire, il ne lui reste qu’à finir de récupérer
mais nous ne doutons pas que la rééducation lui permettra de se retrouver tel
qu’il était avant son agression.
Maeata ressentit un soulagement intense et elle
prévint tout de suite Halidor. Curieusement, son compagnon ne manifesta qu’une
grande indifférence comme si le sort de cet individu ne le concernait pas.
Surprise, elle tenta d’insister :
– Mais enfin Halidor,
je pensais que tu te réjouirais, le médecin vient de me dire que Dimitri Tordahl
n’aura pas de séquelles, tu seras tranquille.
Halidor grommela :
– Il n’a eu que ce qu’il méritait !
– Tu ne penses pas que ta réaction a été
exagérée ?
– Non, il m’a attaqué, ce n’est quand même pas de ma
faute si je ne connais pas tous les artifices imaginés par les humains pour se
distraire !
Maeata, choquée, resta silencieuse. Il avait cru
être attaqué alors que l’animateur souhaitait simplement le prendre par le bras
pour l’intégrer dans le groupe. Cela prendrait du temps pour qu’il assimile
davantage le langage humain, à moins qu’il ne l’acquière jamais…
À suivre… Prochain épisode le vendredi 31 août
2018…
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