Vendredi 1er décembre 2017

Épisode 12 : Vétoldi-Morin entre en contact avec la veuve du député


Immédiatement après sa rencontre avec le député Christophe Carrère, Dominique Vétoldi téléphona au domicile d’Hugues d’Arborville :
– Bonjour, je souhaite parler à Madame d’Arborville.
– C’est moi-même. 
– Bonjour Madame, je m’appelle Nathan Morin ; actuellement, je mène une étude ethnologique sur la vie des députés à l’Assemblée Nationale. C’est dans ce cadre que j’ai fait la connaissance de Christophe Carrère, député qui a bien connu votre époux. Il m’a appris que votre mari écrivait un journal quotidien, et que ce journal était en sa possession, il m’en a remis un double. Il souhaitait vous remettre l’original, je lui ai proposé de vous l’apporter, ce qui me donnerait l’occasion de faire votre connaissance et enrichirait par conséquent mes recherches sur la vie d’un député. 
Madame d’Arborville resta silencieuse, ce que Vétoldi pouvait comprendre, il lui fallait digérer les propos qu’il venait de tenir. Devant le silence persistant de son interlocutrice, ce fut lui qui reprit la parole :
– J’imagine que la vie n’est pas facile pour vous depuis la disparition soudaine de votre époux d’autant plus que vous avez des enfants. 
Cette fois, sa remarque provoqua une réponse immédiate :
– Oui et non, nous n’étions que rarement ensemble, mon mari passait l’essentiel de sa semaine à l’Assemblée surtout depuis qu’il avait abandonné la mairie. Quant aux enfants, ils étaient habitués à l’absence de leur père. A vrai dire, je suis très occupée par tous les documents à remplir, peut-être que plus tard, je ressentirais l’absence.
Hum, Dominique Vétoldi ne s’attendait pas du tout à cette réaction, il se serait attendu à trouver une épouse éplorée, et voilà qu’il tombait sur cette femme à la voix énergique qui disait qu’elle n’avait pas le temps d’éprouver de la souffrance après le décès subit de son mari. C’était surprenant et même étrange… et particulièrement intéressant pour son enquête policière… Il faillit lui demander si le jour de la mort de son mari, elle était présente à Paris, mais il se retint, réservant ses questions pour le moment où il la rencontrerait car il avait besoin d'observer ses gestes et les mouvements de son corps en même temps qu’il écouterait ses paroles, là, maintenant, il était coupé des expressions de son interlocutrice et il ne pouvait donc saisir qu’une part de la vérité, aussi dit-il : 
– Est-ce que vous accepteriez de me recevoir ? Je ne vous dérangerais pas longtemps, mais vous rencontrer enrichirait considérablement mon étude. Il me semble que les engagements des élus de la Nation ne peuvent être étudiés en laissant de côté leur vie privée. 
– Vous savez que le taux de divorce est très élevé parmi les députés ? Et quand ils ne divorcent pas, nombre d’entre eux mènent une double vie, leur femme légitime dans leur circonscription, et une autre à Paris. Je vous rassure tout de suite, ce n’était nullement le cas d’Hugues. Hugues était un gros travailleur, convaincu par ses idées et se battant pour qu'elles se répandent le plus possible. 
– Vous partagiez ses idées ? 
– Cela dépend de quelles idées vous parlez, si vous parlez de son engagement chez les Néo-Royalistes, non, ce n’est pas le parti que moi, j’aurais choisi, mais si vous parlez de ses valeurs, oui, je partageais ses valeurs, honnêteté, travail, sens du dévouement social… 
– Vous travaillez vous-même ? 
– Non, pas jusqu’à présent, nous avons quatre enfants. Hugues estimait que la femme d’un député ne travaille pas, qu’elle n’en a pas besoin et qu’elle doit laisser l’emploi qu’elle occuperait aux autres. Il était très traditionnel sur ce plan, comme sur d’autres. 
– Je pense que vous aurez beaucoup de choses à me dire, puis-je venir vous voir et quand ? 
– Quand vous voulez, mais de préférence pendant que les enfants sont à l’école. Je veux éviter de les inquiéter. 
– Serait-ce possible demain matin ? 
– Demain matin ?  Attendez une minute que je jette un œil sur mon agenda.
Dominique Vétoldi patienta, le temps lui sembla très long, que faisait-elle ? Enfin, elle reprit le téléphone et elle accepta :
– Ecoutez, c’est d’accord, je me suis arrangée, ce sera fait. Vers quelle heure arriverez-vous ?
– Je prendrai un train de bonne heure, et donc, je devrais pouvoir vous retrouver vers onze heures, cela vous conviendra-t-il ? 
– Oui, parfait, d’autant que je n’aurai pas les enfants à déjeuner. Vous avez mon adresse ? 
– Oui, merci pour votre accord, à demain. Je vous confirmerai mon heure d’arrivée lorsque j'aurai acheté mon billet de train.
– Ce n’est pas la peine, d’autant que vous venez à mon domicile, je vous attendrai à partir de onze heures, à demain, au revoir Monsieur. 
– Au revoir Madame et merci beaucoup d’avoir accepté. 
Dominique Vétoldi raccrocha, satisfait. Il décida de consacrer le reste de sa journée à préparer les questions qu’il souhaitait poser le lendemain à Madame d’Arborville, mais auparavant, il voulait lire le journal du député défunt. Il commença le texte et fut tellement pris par sa plongée dans un monde qui lui était étranger qu’il en oublia de déjeuner, jusqu’au moment où son estomac lui rappela par ses gargouillements qu’il avait faim. Il consulta sa montre, il était quinze heures. Il sortit de son bureau et fila jusqu’à une boulangerie qu’il avait repérée rue de Bourgogne, et qui proposait de savoureux sandwiches. Une fois repu, il retourna à son bureau mais avant de reprendre sa lecture, il réserva son trajet de train pour Fontenay le Comte. Il découvrit avec stupéfaction qu’il lui fallait s’arrêter à la gare de Niort et poursuivre en autocar. Son train partait à 7h27 et il n’arriverait à Fontenay-le-Comte que trois heures plus tard, à 10h23. Il fut effaré de constater qu’il lui faudrait à peine plus de deux heures pour tracer les 412 kilomètres de Paris à Niort mais une heure pour les trente-quatre kilomètres qui séparaient Niort de Fontenay le Comte. Il exprima à voix haute ce qu’il pensait : J'ai entendu à la radio que les Français prenaient de moins en moins souvent le train… on en voit la raison. Les petites villes de province n’ont plus de gare. 
Sur ce, il retourna à sa lecture qui s’avéra très longue car il prenait des notes tout au long. 

A suivre… 
Prochain rendez-vous le vendredi 8 décembre 2017… 





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